L’architecture en Colombie est un perpétuel aller-retour entre passé et présent. Pendant plus de trois siècles, la couronne espagnole a gouverné cette région du monde, y laissant une empreinte indélébile.
Flâner le long de ruelles colorées. Se reposer quelques instants au cœur d’un patio ombragé. Puis écouter le tintement d’un clocher blanchi à la chaux, surplombant une église aux ornements baroques. Où que vous soyez en Colombie, vous serez charmés par son architecture. Un héritage du passé colonial qui contraste avec la modernité des villes. Une immersion dans l’histoire de tout un continent.
Un point d’histoire
L’occupation du territoire sud-américain par les colons européens débute avec l’arrivée de Christophe Colomb dans les Caraïbes en 1492. Le territoire colombien n’est atteint qu’au début du XVIème siècle après plusieurs expéditions. En 1510, les colons espagnols s’installent à San Sebastian de Uraba, dans le golfe qui porte le même nom. La côte caribéenne est alors logiquement propice à l’expansion des premiers ports d’où partent les richesses à destination de l’Europe et arrivent les esclaves venant d’Afrique. Les Espagnols conquièrent ensuite les parties andines du territoire, unifiant le vice-royaume de la Nouvelle-Grenade.
Les autorités espagnoles organisèrent la vie de la cité selon les codes de la métropole. Les villes se structurent autour de la PlazaMayor , la place principale, où se trouvent les principaux édifices officiels. Les rues sont quadrillées et pavées. Et la ville se couvre d’églises, de casernes militaires, de couvents ou de grandes maisons qui adoptent les styles architecturaux d’Extremadura, d’Andalousie ou d’Afrique du Nord. Les patios, les murs de chaux, les balcons sculptés sur la rue, sont autant d’éléments que les Espagnols ont reproduits de l’autre côté de l’Atlantique.
Les villes à ne pas manquer
Carthagène
Déclarée Patrimoine Culturel de l’Humanité par l’UNESCO en 1984, la cité caribéenne revêt un charme indéfinissable. La capitale de la région de Bolivar compte plus d’un million d’habitants. La ville, fondée en 1533, fut le bastion du royaume d’Espagne. Elle est surplombée par un fort militaire qui fut maintes fois la cible des attaques de pirates. Son histoire est intimement liée à celle du continent.
Jouxtant les ruelles populaires et les quartiers métissés, la cité fortifiée abrite les majestueuses demeures coloniales des conquistadors de l’époque. Les grandes familles colombiennes actuelles vivent dans ces manoirs aux portes cloutées et aux balcons ornementés. La ségrégation spatiale qui existait à l’époque perdure aujourd’hui. Le centre a entièrement été restauré, rendant aux bâtiments coloniaux toutes leurs couleurs. Au cœur de la cité, la place de la Douane, où a vécu Pedro de Heredia le fondateur de la ville, vaut le détour.
Mompox
Un peu plus au Sud du département de Bolivar, Santa Cruz de Mompox borde le rio Magdalena, le plus grand fleuve de Colombie. Fondée en 1539, cette cité naît grâce au commerce avec Carthagène. Elle est un jalon indispensable pour relier les territoires de l’intérieur. Les Espagnols y stockaient l’or et l’argent.
Symbole fort : une église remplace sur les trois places principales l’emplacement des anciens villages indigènes. Malgré un inévitable déclin économique, Mompox a conservé son authenticité et son patrimoine historique. Elle est l’archétype de la ville coloniale en Colombie et aurait inspiré Gabriel Garcia Marquez pour son roman Cent Ans de Solitude.
Villa de Leyva
Classée monument national en 1954, Villa de Leyva se situe à quelques encablures seulement de Bogota. La ville se distingue par ses rues pavées et ses maisons blanches. De nombreux colombiens viennent y séjourner en fin de semaine car le climat y est doux toute l’année.
La place centrale est immense et est le théâtre du carnaval des cerfs-volants en août. L’immense cathédrale trône au milieu des petites maisons à un étage, sa couleur légèrement orange tranche avec les couleurs de maisons blanchies à la chaux.
En s’enfonçant un peu plus au cœur du département de Boyaca, vers Sogamoso, vous découvrirez Mongui, un petit village jonché sur la montagne. Avec ses vieilles bâtisses et son pont de pierres, ce village hors des sentiers battus mérite le détour. Juste au-dessus, le Lac de Tota et ses villages offrent également un portrait assez fidèle des villages coloniaux d’alors. Plus au Nord, sur les collines de Santander, la bourgade de Barichara et ses toits de tuile rouge offre aussi une vue spectaculaire. Les bâtisses coloniales servent aujourd’hui de villégiature pour les colombiens de la capitale mais abritent également de nombreuses galeries d’art, des restaurants et des hôtels typiques.
Popayan
La capitale du département de Cauca est également l’un des centres religieux les plus marquants de Colombie. « La ville blanche » et ses 300 000 habitants accueillent chaque année d’importantes processions religieuses durant la Semaine sainte.
Cœur des traditions chrétiennes de la Colombie, la ville regorge d’églises et de chapelles : Belén, Ermita de San Francisco, d’El Carmen, la Encarnación pour finir par le musée des Arts Religieux.
La noblesse espagnole et de riches commerçants ont contribué à l’édification de cette cité surplombée par la Cordillère des Andes. Elle est considérée comme un chef d’œuvre d’architecture coloniale. Les habitants se retrouvent le soir sur les places. Le parc Caldas notamment, à l’abri des palmiers, offre une vue sur la Cathédrale Nuestra Señora, le Palais du Gouvernement du Cauca et la Tour de l’Horloge devenue symbole de la ville.
La Candelaria à Bogota
Dans le rugissement d’une capitale aussi tentaculaire que Bogota, le quartier historique de la Candelaria est un havre de paix. Les bâtiments coloniaux en cours de rénovation retrouvent peu à peu de leur superbe. Au Chorro de Quevedo, la plus ancienne église de la ville surplombe les toits.
Le street-art confère aux façades des édifices coloniaux un charme décalé. Certains disent que la Candelaria est comme une boîte de chocolats : on ne sait jamais sur quoi on va tomber. Il suffit de pousser la porte d’une maison pour se retrouver parfois dans des patios aménagés en atelier d’art ou restaurant. Longtemps déserté par les classes aisées qui le peuplaient autrefois, le quartier fait aujourd’hui peau neuve. La Candelaria est le centre névralgique de Bogota où se mêlent toutes les couches sociales.
Pour aller plus loin : Film : Sergio Cabrera, La stratégie de l’escargot, 1993. Un film plein d’humour qui retrace le mode de vie partagé des familles vivant dans les vieilles bâtisses coloniales de la Candelaria et qui luttent pour y rester.
Texte d’Eliott Brachet