Marius est parti explorer une région encore très méconnue, ouverte depuis peu aux visiteurs: le Guaviare. Un véritable coup de cœur, dont il vous livre ses plus belles découvertes.

Le Guaviare… Aucun guide touristique n’en parle vraiment, presque personne ne sait le situer sur une carte et, contrairement à Tayrona, Salento ou Carthagène des Indes, il ne figure sur la wishlist d’aucun voyageur. Cette région cachée entre la Cordillère Orientale et le bassin amazonien, il est bien facile de ne pas la remarquer. Seulement voilà, il n’y a rien qui m’attire plus qu’un trésor enfoui, d’autant que j’ai entendu parler de diverses merveilles: magnifiques paysages sauvages, faune fourmillante, et surtout d’étranges peintures préhistoriques… C’est parti pour l’aventure !

nº1: La délicieuse sensation d’être seul au monde

C’est un tout petit avion qui m’amène dans le Guaviare. Il y a bien une route – une seule – qui y mène depuis Bogotá, au prix de dix heures de route, alors que par les airs, le voyage dure à peine 40 minutes. Depuis le hublot, les montagnes cèdent la place à un vaste horizon vert parcouru de rivières en lacets. Dans cette immensité naturelle, San José apparaît soudain, minuscule ville sur les rives du fleuve Guaviare qui serpente avec langueur. C’est le point de départ pour explorer la région, avec à peine plus que de petits hameaux à des centaines de kilomètres à la ronde – et de la jungle, beaucoup de jungle.

Dans les rues de San José où résonne la musique Llanera et les clameurs des vendeurs, on rencontre exclusivement des gens du coin, au chapeau à large bord et au grand sourire. Pas un seul touriste, aucune boutique clinquante, rien que la vie locale bouillonnante et sincère. Dans les jours qui suivent, cette sensation se confirme de plus en plus. Même sur des sites naturels et archéologiques, personne ne vient troubler ces moments exceptionnels. C’est un véritable tête-à-tête avec le Guaviare, une intimité privilégiée avec cette région hors du commun.

nº2: Une nature incroyablement généreuse

Je pose mon sac à mon hôtel et sans attendre je me lance à la découverte de la jungle avec mon guide. Une fois sortis de San José la nature reprend totalement le dessus, pour mon plus grand plaisir. Direction Nuevo Tolima, une petite montagne mangée de végétation et qui abrite de superbes parois d’art pariétal.

Tout autour, la nature bruisse : les hauts feuillages de arbres se balancent dans le vent tiède, des oiseaux gros et petits se répondent de loin en loin, une famille de singes à la fourrure rousse converse au-dessus de ma tête en sautant de branche en branche. À la nuit tombée, les couinements des chauves-souris peuplent la forêt.

Dans les jours qui suivent, la jungle se fait toujours plus présente. Lors des randonnées en forêt, des nuages de papillons jaunes s’envolent sur mon passage et les colibris peu timides viennent m’observer. Je me rafraîchis sur les rives d’un improbable ruisseau aux algues roses dansant dans le courant.

Les couchers de soleil sont des spectacles à part entière, emplissant le ciel de violet et d’orange, et apportant leur fraîcheur bienvenue.

Toute cette vie végétale et animale est à sa place ici, nourrie du soleil, de la chaleur et des pluies abondantes du Guaviare, insouciante et généreuse, bien loin du monde moderne. Un vrai délice !

nº3: Une rencontre avec les ancêtres de l’humanité

Lors de ma visite au Cerro Azul, mon guide me raconte que les premiers humains à peupler le continent Sud-Américain étaient datés à il y a environ 8 000 ans. En tout cas, c’était le cas avant la découverte de sites d’art rupestre comme ceux qui pullulent dans la région. Très récemment, les archéologues se sont penchés sur les impressionnantes parois couvertes de dessins et de symboles rouges, pour estimer certaines de ces peintures à plus de 12 000 ans. Ces découvertes, qui remettent en question tout ce que l’on croyait savoir des premiers peuplements d’Amérique, n’en sont qu’à leurs débuts, à mesure que le Guaviare livre peu à peu ses secrets enfouis dans la jungle.

Cerro Azul n’est qu’un site archéologique parmi tant d’autres dans la région, mais c’est incontestablement le plus beau. Arborant de nombreuses fresques sur des parois naturelles de plusieurs dizaines de mètres de long, le tout dans un écrin végétal livré à lui-même, ce lieu est absolument fascinant. Si certaines peintures de ces civilisations disparues sont reconnaissables – singes, cervidés, tapirs, oiseaux, caïmans, femmes et hommes – d’autres sont encore tout-à-fait mystérieuses.

Ces messages venus de temps révolus, tracés à la peinture pourpre sur ces parois immenses, sont comme une énigme, l’une des plus anciennes qui soit. Elles confèrent une atmosphère étrange à ces lieux qui semblent ainsi habités d’esprits anciens – pas étonnant que les gens du coin, s’ils prennent grand soin de ces sites, les considèrent parfois comme maudits…

 

nº4: Un souffle d’air après des temps difficiles

Entre deux expéditions à la Indiana Jones, se reposer à San José est fort bienvenu. Si le village n’est pas particulièrement joli, il compense largement par sa tranquillité et son authenticité. On a ici accès à la vraie Colombie, sans fard, et une fois de plus les Colombiens font honneur à leur réputation d’hospitalité et de bienveillance. À se promener dans les ruelles, flâner le long du fleuve ou lézarder en terrasse des restaurants, on a peine à croire qu’il y a à peine quelques années la région n’était pas si accueillante.

Si le Guaviare vient tout juste de s’ouvrir aux visiteurs, c’est parce que la région s’est récemment redressée d’une situation difficile. Mais ici comme dans de nombreux coins de Colombie, l’insécurité liée au trafic de drogue a cédé la place à un contexte plus apaisé, au plus grand bonheur des populations locales dont le quotidien s’est notoirement amélioré. L’un des tremplins de cette incroyable transformation, c’est d’ailleurs le tourisme : en plus de représenter une belle opportunité ainsi qu’un motif de fierté culturelle pour les gens du coin, il contribue directement à la préservation des sites naturels et archéologiques, et au maintien de la paix dans la région. Aujourd’hui dans le Guaviare, l’ambiance est totalement détendue, et ça se sent !

 

nº5: Tout ce que la Colombie a à offrir

Le moment du départ est déjà là et je quitte San José à regret. J’ai peine à croire qu’en quatre jours à peine, j’ai eu la chance de vivre autant d’expériences inoubliables. J’ai déjà voyagé dans de très nombreuses régions de Colombie, et pourtant aucune ne m’a semblé aussi riche et diversifiée que le Guaviare. Les gens ici sont d’une amabilité à toute épreuve, la musique Llanera anime les rues de San José et les spécialités culinaires locales sont délicieuses.

Pour l’amateur de randonnées que je suis cette région est un petit paradis tropical, même si des voyageurs plus relax y trouveraient aussi leur compte. La biodiversité est d’une richesse insoupçonnable, je peux facilement imaginer le plaisir qu’aurait un photographe ou un ornithologue dans un lieu pareil. La culture actuelle et l’Histoire ancienne se mêlent avec ces surprenants sites archéologiques qui commencent tout juste à livrer leurs secrets.

De retour à la maison, cette parenthèse ressemble presque à une histoire inventée, de ces légendes de terres lointaines et introuvables, un triangle des Bermudes en pleine jungle. Je crois que je garderai longtemps en mémoire ces étranges figures de peinture rouge tout droit sorties d’une autre époque…

 

 

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